23 juin 2014
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Homélie Cardinal Sarr : Jubilé d’Or Paroisse Saint Jean Baptiste de Niakhar et Fête du Corps et du Sang du Christ
Chers confrères dans le sacerdoce,
Chers religieux, religieuses,
Chers frères et sœurs dans la foi,
1- La coupe d’action de grâce, que nous bénissons ; le pain que nous rompons, ne sont-ils pas communion au Sang et au Corps du Christ ? « Puisqu’il y’a un seul pain, la multitude que nous sommes est un seul corps… » (1 Co 10, 16-17) Nous reconnaissons les paroles de l’Apôtre Paul, dans la deuxième lecture de ce jour, qui appartient à la liturgie de la grande Fête du Saint Sacrement, que nous célébrons en ce deuxième dimanche après la Pentecôte.
Si j’ai commencé cette méditation, en reprenant ces paroles de l’Apôtre Paul, c’est pour mettre en lumière le terme « COMMUNION », qui exprime parfaitement le sens de notre célébration de ce jour.
Communion, oui, parce que c’est le lien fort, qui unit aujourd’hui l’ensemble de la Communauté chrétienne de cette Paroisse Saint Jean Baptiste de Niakhar qui, tout en fêtant son Saint Patron, célèbre aussi ses cinquante (50) ans d’existence.
Communion, oui, parce que les célébrations des cinquante ans de votre paroisse coïncident avec celles de mes Jubilés de 50 ans de sacerdoce, et de 40 ans d’épiscopat. Vous me donnez ainsi l’occasion, comme Pasteur de l’Eglise diocésaine de Dakar, d’étendre mon action de grâce au cœur du Sine, pour la joindre à la vôtre, et j’en suis très heureux.
2- Cinquante ans d’existence comme Paroisse ! Un beau chiffre, qui manifeste que vous êtes devenus une Communauté chrétienne adulte. Mais être une Communauté chrétienne adulte ne tient pas seulement au nombre d’années de son existence, ni au nombre de structures mises en place (église paroissiale, presbytère…), encore moins au nombre de Secteurs apostoliques ou de villages constituant la Paroisse… Si tout cela est important, retenons simplement qu’être une Communauté chrétienne adulte tient avant tout à la qualité de la communion de ses membres à Jésus-Christ. Oui, pour qu’une communauté chrétienne soit vraiment adulte, il faut que ses membres soient unis à Jésus-Christ, comme ses disciples authentiques et ses vrais témoins dans le monde.
Pour qu’une communauté chrétienne soit adulte, il faut aussi que ses membres réalisent ce que disait le Pape François dans son homélie de la fête du Saint Sacrement de l’année dernière : « C’est en écoutant sa Parole, en nous nourrissant de son Corps et de son Sang, que le Christ nous fait passer de l’état de multitude à l’état de communauté, de l’anonymat à la communion. » Oui, chers chrétiens de Niakhar, pour que votre communauté chrétienne soit adulte, il ne faut pas seulement que vous soyez nombreux comme baptisés, mais que vous soyez une vraie communauté, parce que vous êtes unis comme des frères et sœurs, fils et filles du même Père, petits frères et petites sœurs du Grand Frère, qu’est le Fils de Dieu fait homme.
Oui, pour que votre communauté paroissiale soit adulte, il ne faut plus que vous viviez dans l’indifférence les uns par rapport aux autres, mais que vous vous sentiez solidaires les uns des autres, par la foi en Jésus Christ, et que donc vous soyez unis comme les membres d’une même famille.
Voilà pourquoi, la Mission de notre Plan d’Action Pastoral (PAP III) nous plonge dans la grande ambition de « Bâtir l’Eglise Famille de Dieu », en nous fixant, comme objectif, de « faire de nos Communautés chrétiennes (Paroisses, CEB, Familles, Communautés sacerdotales et religieuses) des maisons et des écoles de la fraternité en Jésus-Christ… »
Ce pari, nous ne pouvons le gagner sans sortir de nous-mêmes, pour la cause de l’Evangile, pour aller à la rencontre de Jésus-Christ, pour accueillir sa Parole, et en faire la lampe de nos pas, une lumière sur la route de notre vie de tous les jours ; pour encore recevoir son Corps en nous et devenir, chaque fois, un avec Lui.
Il nous faut aussi sortir de nous-mêmes, pour nous ouvrir aux autres, faire attention à eux, les aimer, et partager avec eux tout ce que nous pouvons.
Chers paroissiens de Niakhar, en célébrant aujourd’hui les 50 ans d’existence de votre paroisse, nous ne pouvons ne pas rendre hommage à tous ces hommes, à toutes ces femmes qui, à leur manière, et selon le don de Dieu, ont communiqué aux communautés villageoises de cette paroisse, les lumières de la foi chrétienne et les conduites nouvelles de la vie chrétienne. Ce sont les prêtres, religieux, religieuses, qui ont fait beaucoup de sacrifices, pour venir vivre avec vous, à Niakhar et dans les villages environnants. Ce sont aussi tous ces laïcs, hommes et femmes, en particulier les Catéchistes, qui ont sillonné et continuent de sillonner les villages de cette paroisse, pour y semer la graine de l’Evangile, et pour faire grandir toutes les pousses de l’Evangile dans les esprits, les cœurs des hommes et des femmes, de leurs familles et leurs communautés. Ils nous donnent, aujourd’hui, de rendre grâce à Dieu, en empruntant les paroles même de Zacharie : « Béni soit le Seigneur, le Dieu d’Israël, de ce qu’il a visité et délivré son peuple. » (Lc 1, 68)
3- « L’enfant grandissait, et son esprit se fortifiait… », nous raconte Saint Luc au v. 80 du premier chapitre de son Evangile. Saint Luc nous parle bien sûr de Jean Baptiste, celui-là même, dont Jésus témoignera plus tard : « De plus grand que Jean parmi les enfants des femmes, il n’y en a pas. » Mais Jésus ne s’arrête pas là. Il poursuit en disant : « Cependant, le plus petit dans le Royaume de Dieu est plus grand que lui. » (Lc 7, 28). Qu’est-ce à dire, sinon qu’il nous faut accepter l’oubli de soi et le dépassement. Célébrer Saint Jean Baptiste comme Saint patron doit nous amener à comprendre qu’il nous encourage à nous oublier, à nous dépasser, à nous convertir chaque jour, c’est-à-dire à changer notre vie, pour qu’elle ressemble à celle de Jésus-Christ. Oui, comme Jean Baptiste, nous devons, nous aussi, comme Communauté paroissiale, comme baptisés, accepter de grandir, laisser notre esprit se fortifier en Dieu, à la lumière de l’Evangile ; il nous faut apprendre à aimer Dieu pour Le servir, à aimer l’Eglise pour la servir, à aimer les hommes pour les servir.
Oui, Dieu veut avoir besoin de nous aujourd’hui, pour que son Nom soit mieux connu, dans ces terres du Sine. « Tous appelés, tous envoyés », comme le Prophète Isaïe l’exprime, dans la première lecture : « Yahvé m’a appelé dès le sein maternel, dès les entrailles de ma mère, il a prononcé mon nom (…) Il m’a dit : ‟Tu es mon serviteur Israël, toi en qui je me glorifierai.” » (Is 49, 1.3)
« Tous appelés, tous envoyés », tel est le message central, dont l’Abbé Léon DIOUF et moi-même avons voulu faire écho, tout au long des célébrations, qui continuent de marquer nos cinquante ans de sacerdoce. Ce message, je suis heureux de le lancer encore ici, à Niakhar, à la faveur de ce cinquantenaire paroissial, en trois appels :
- D’abord, il vous faut comprendre que votre paroisse n’est pas celle des prêtres qui s’y succèdent. Chacun d’eux vient et viendra avec ses charismes, et travaillera selon ses possibilités. Soyez ouverts envers eux, et accueillez-les ; aimez-les, soutenez-les généreusement en collaborant avec eux. Choisis d’entre les hommes, choisis de vos milieux et de vos familles, vos prêtres ne pourront rien faire sans votre soutien. Etre paroisse, être une communauté paroissiale adulte, c’est aussi savoir prendre soin de ses pasteurs, et contribuer à subvenir à leurs besoins, en construisant avec eux.
- Ensuite, il vous faut comprendre que chacun de vous a sa place au sein de l’Eglise, qui se veut une Famille, comme dit l’apôtre Paul, en Ga 3, 28 : « Il n’y a ni juif ni Grec ; il n’y a ni esclave ni homme libre ; il n’y a ni homme ni femme ; car tous ne faites qu’un dans le Christ Jésus. » Sachez, vous aussi, rendre vivante votre appartenance commune à Jésus, en laissant chacun s’exprimer et agir, selon les dons reçus de Dieu. Aussi, voudrai-je vous féliciter de cette belle initiative, pas très commune, dans nos paroisses, d’avoir un Mouvement pour les hommes, appelé « Waag basil », à côté des Mouvements habituels de Femmes.
- Enfin, que la Messe soit le cœur de votre vie paroissiale, et le centre de vos préoccupations, surtout ici même à Niakhar, mais aussi dans les villages et les différents Secteurs. C’est un appel lancé aux prêtres, à ne ménager aucun effort, pour que toutes nos communautés chrétiennes puissent profiter de ce rendez-vous de prière et de louange de manière régulière, en faisant montre d’un véritable esprit de sacrifice. C’est aussi un appel lancé à tous les baptisés, à faire de l’Eucharistie, le moyen et le moment de nourrir leur solidarité fraternelle par la communion avec Jésus-Christ, « car c’est seulement dans le partage, dans le don, que notre vie sera féconde, et portera du fruit. » (Pape François) Amen !
† Théodore Adrien Cardinal SARR
Archevêque de Dakar
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